La capitulation allemande

25 août 1944, 14h35 … les lieutenants Karcher et Franjoux, de la 2ème Division blindée, pénètrent dans le hall de l'hôtel Meurice. Le général von Choltitz a accepté de se rendre. Le commandant de la Horie le prend en charge et le fait sortir par la porte donnant dans la rue du Mont Thabor. Sur le chemin de la Préfecture, changement de véhicule, von Choltitz monte dans le scout-car du colonel Billotte sous les huées de la foule.

Boulevard du Palais, dans les salons du Préfet de police au 1er étage, le général Leclerc attend, impatient. Enfin Billotte arrive : "Le voilà !" dit-il avant d'aller s'appuyer dos à la fenêtre. Von Choltitz entre dans la pièce, esquisse un mouvement de la main.

"Je suis le général Leclerc. Etes-vous le général von Choltitz ? Asseyez-vous !"

Aucune photo n'a été prise de ce moment historique.


Dans l'ouvrage d'Adrien Dansette, Histoire de la Libération de Paris, on découvre le plan de la salle

Le capitaine Betz, de la 2ème DB servira d'interprète, il se place entre le général Leclerc et le général von Choltitz. Le colonel Rol-Tanguy et Kriegel-Valrimont, membre du COMAC (Commission d'action militaire), ont obtenu via le général Chaban-Delmas d'être présents. Il serait intolérable que les FFI qui luttent depuis une semaine pour la Libération de Paris ne soient pas représentés à la capitulation allemande, ont-ils affirmé.

Le capitaine Betz lit en français puis en allemand le projet de capitulation :

– ordre aux commandants des points d'appui de cesser le feu et de hisser le drapeau blanc
– communication de l'ordre de bataille des troupes et des emplacements des dépôts de matériel
– mise à disposition d'officiers allemands pour transmettre les ordres de reddition

Le général Leclerc signe, puis c'est le tour du général von Choltitz.

Plus tard dans l'après-midi Kriegel-Valrimont insiste auprès de Chaban-Delmas. Rol-Tanguy doit signer lui aussi. Leclerc, convaincu par Chaban-Delmas, accepte et fait changer l'en-tête de la convention :

"Conventions de reddition conclues entre le colonel Rol-Tanguy, commandant les FFI de l'Ile de France, le général de division Leclerc, commandant la 2ème DB et le général von Choltitz …."

Quand dans quelques heures le général de Gaulle prendra connaissance de ce document,  il fera remarquer d'une voix glaciale à Leclerc que le nom de Rol-Tanguy n'avait pas à figurer sur l'acte de capitulation.

Direction la gare Montparnasse, le PC de Leclerc. Sur le command-car debout à gauche le colonel Rol-Tanguy, devant lui Kriegel-Valrimont et le général von Choltitz.

Dans un bureau de la gare le général allemand signe des ordres particuliers destinés aux commandants des points d'appui. Ces ordres seront confiés à des équipes mixtes, officier français et officier allemand, qui les porteront en main propre.

Cette photo est très souvent présentée comme la signature de la capitulation par von Choltitz. On l'a vu, aucun photographe n'était présent dans la salle de la Préfecture de police. En fait voici le cadrage original :


A gauche, debout, le capitaine Betz, l'interprète du général Leclerc; à droite assis, le sourire aux lèvres, le sous-lieutenant Braun, lui aussi de l'état-major de la 2ème DB. La scène se passe dans le bureau 32 de la gare Montparnasse donnant sur la voie n°3.

Alfred Betz a confié à Pierre Bourget (Paris 44, occupation, libération, épuration) le récit suivant :

Dietrich von Choltitz réclame soudain du papier.

"Je souhaite récupérer ma cantine contenant mes affaires personnelles disparues au Meurice"

"Ecrivez un petit mot", lui répond Betz

Entre alors dans la pièce un photographe américain qui immortalise la scène. Sur le moment je n'y ai pas prêté attention. Mais je fus surpris, aussitôt après, quand la photo fut publiée avec comme légende : "Von Choltitz signe la capitulation". Et ça fait des années que ça dure !


Von Choltitz est amené vers 20h00 au PC du général Barton commandant la 4ème Division d'infanterie américaine puis de là vers Cherbourg d'où il prendra un avion qui le conduira en captivité en Angleterre.