Les artistes et la Libération de Paris

Pendant quatre années des millions d’hommes en France ont ri, joué la comédie, bu et mangé. On n’a jamais créé autant de pièces, tourné autant de films que pendant ces quatre ans d’occupation. Alors que dans d’autres pays les restaurants et les salles de spectacles restaient fermés, cet Allemand avait raison qui s’exclama un jour « Vous avez l’air bien gais pour des vaincus ! », rapporte André Halimi dans son livre « Chantons sous l’occupation ». Mais il faut noter également que des artistes confirmés ou en devenir prirent aussi les armes pour délivrer la capitale. Certains poursuivirent les combats jusqu’à la capitulation allemande tandis que la Commission d’épuration du spectacle en mettait d’autres à l’index. Par jalousie professionnelle, prétendirent quelques épurés…

Ci-après quelques articles parus sur la page Facebook « Libération de Paris 19-25 août 1944 ».

En 1966, quand René Clément engage Claude Rich pour le tournage de « Paris brûle-t-il ? », il ne sait pas que l’acteur a participé à la Libération de Paris. Boulevard Saint-Michel, le 25 août 1944, FFI et soldats de Leclerc attaquent la garnison du Sénat. Le jeune Claude, 14 ans à peine, assiste aux combats en badaud. Il est interpellé par deux secouristes qui brancardent un blessé :

– Tiens ! Aide-nous à le transporter.

– C’est un FFI ou un Leclerc ?

– Ta gueule ! C’est un Français…

Initialement retenu pour jouer le rôle du lieutenant de la Fouchardière, sa grande ressemblance avec le général Leclerc conduira René Clément à lui confier les deux personnages.

 

 

 

Jean Gabin, 40 ans, est à la recherche d’une unité combattante. Il va rejoindre enfin le Régiment blindé de fusiliers marins de la 2ème DB. Marlène Dietrich, 43 ans, soutient le moral des soldats du général Patton dans le cadre de l’USO (United service organizations) en donnant des concerts. Ils se sont connus aux Etats-Unis, se voient à Paris. Il se battra en Alsace. Elle chantera Lili Marleen en  Tchécoslovaquie. Ils se retrouveront en Allemagne lors d’une prise d’armes devant le général de Gaulle. La légende veut qu’ils ont failli se marier…

 

 

 

Jean-Claude Villeminot, 17 ans et élève du lycée Jeanson-de-Sailly, s’engage dans les rangs de la 2ème DB et est affecté comme agent de liaison motocycliste au 1er Régiment de spahis marocains. Le 23 novembre 1944, chargé de porter des ordres à un chef d’unité, il se perd sur les petites routes de la plaine d’Alsace et pénètre dans Strasbourg que l’armée allemande évacue. Demi-tour immédiat et compte-rendu. Premier soldat français à être entré dans la capitale alsacienne, il sera décoré de la Croix de guerre. En 1948 il devient Jean-Claude Pascal et entame une carrière cinématographique à succès.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jean Marais, 31 ans, veut participer à la libération de Paris. On lui donne une arme et un brassard et on l’envoie récupérer un camion allemand abandonné dans l’Ecole de police de Beaujon. Il est ensuite affecté à la garde du Palais de l’Elysée derrière une mitrailleuse. Dans ses souvenirs il avouera modestement qu’il ne savait pas se servir d’une mitrailleuse et que le seul danger qu’il a couru ce sont les balles des tireurs des toits avenue de l’Opéra. Il s’engage alors dans la 2ème DB du général Leclerc. Quelques semaines de classes à Saint-Germain-en-Laye et il rejoint le 501ème RCC comme ravitailleur en essence. Tâche dont il s’acquittera avec beaucoup de mérite puisqu’il sera nommé caporal et cité à l’ordre de la Brigade. Il a obtenu la permission de partir avec son chien Moulouk et il existe une photo de sa jeep « Célimène ». En février 1945 il obtient une permission pour tourner un film avec Jean Cocteau. Il participe également au Théâtre aux armées, ici le 26 mars 1945 à Châteauroux.

 

 

Le 20 août 1944 le capitaine Roger Worms, 25 ans, prend possession de l’Hôtel de Ville. Dans son groupe de FFI un élève du Conservatoire national supérieur d’art dramatique : Gérard Philip, 22 ans. Roger Worms, dit Roger Stéphane (1919-1994), journaliste et écrivain, cofondera l’Observateur politique, économique et littéraire en 1950 qui deviendra le Nouvel observateur en 1964. Gérard Philip, dit Gérard Philipe (1922-1959), sera l’inoubliable interprète au théâtre de Caligula (1945) et du Cid (1951) et gagnera le statut « d’idole des jeunes » à travers le monde entier avec  le rôle de Fanfan la Tulipe au cinéma (1952).

 

 

 

 

 

 

 

Des FFI se sont précipités quai Conti pour arrêter Léonie Bathiat, plus connue sous le nom d’Arletty, à qui l’on reproche une liaison avec l’officier allemand Hans Jürgen Soehring, membre du conseil de guerre de la Luftwaffe à Paris. Elle sera internée quelques jours à Drancy puis à Fresnes. A une détenue qui lui demande des nouvelles de sa santé, elle répond : « Pas très résistante ! » A un FFI qui lui reproche sa conduite, elle lance : « Si mon cœur est français, mon cul, lui, est international ! »

Atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ? 

Mme Raymonde, la prostituée de l’Hôtel du Nord (Marcel Carné 1938), n’avait pas perdu son sens de la réplique.