André – Ces journées ? Une véritable folie

Pardon pour la chronologie des faits. Le temps sans doute ! Mais aussi le flou, pour ne pas dire la pagaille, qui régna pendant ces quelques jours précédant l'arrivée des Alliés. Ce qui n'était pas sans me rappeler l'entrée des Allemands en 1940 : fausses informations, 5ème colonne, parachutistes et faux curés.

L'enthousiasme populaire est très vite douché par les F.F.I qui nous font rentrer chez nous. Pendant les accalmies, je participe à la construction de barricades, boulevard du Montparnasse, 50 mètres au dessus de Duroc, carrefour avenue de Ségur, avenue de Saxe (Place Fontenoy) et carrefour Sèvres-Breteuil-Pasteur.

Dans l'après midi un officier allemand, nu-tête et vareuse ouverte, marche à côté de son véhicule qu'il guide par le volant, la première vitesse enclenchée sans doute, vers Duroc.

24 août en fin de matinée, un véhicule allemand, sorte de camion équipé d'une mitrailleuse, tire en enfilade dans la rue de Sèvres. La barricade de sacs de sable de la Défense passive s'effondre. Juste sous ma fenêtre une femme est mortellement touchée. Elle se vide de son sang sur la chaussée.


(A cette date, on trouve dans les registres de l'hôpital Necker les décès de Marcelle Bardy née Fistache, âgée de 47 ans, et de Marie Descates, 54 ans, victimes de mitraillades. D'autre part le cadavre de Jeanne Moye, 70 ans, elle aussi mitraillée, est relevé à l'angle du boulevard Pasteur et de la rue Lecourbe, donc à quelques mètres de l'immeuble d'André).


Place Fontenoy

25 août, du boulevard des Invalides arrivent en file indienne, longeant les immeubles de chaque côté de la rue, les soldats de la 2ème Division blindée. Peu ou pas de coups de feu.

On "gueule" sur leur passage … on se fait "engueuler" à cause des barricades qui les gênent dans leur progression.


rue Duroc

A la hauteur de la barricade, arrêt forcé. La foule se précipite. Les soldats sont des Espagnols qui nous demandent de les aider à se libérer de Franco. Leclerc arrive une heure après. Ils partent en flèche vers Notre Dame.


boulevard des Invalides

La justice populaire ? La fenêtre de mon appartement donne sur l'hôpital Necker. Je vois des cercueils entassés les uns sur les autres. Des infirmières tondues, une croix gammée peinte sur le crâne, travaillent avec d'autres infirmières.

Les tireurs des toits ? Tous les gens qui portent une arme tirent sur tout ce qui bouge. En face de chez moi, côté avenue de Saxe, habite mon copain Jean, fils de Charles Brune futur ministre de l'Intérieur de la 4ème République. A la fenêtre, un drapeau français. Soudain des coups de feu. Qui a tiré ? Par curiosité je tente de monter sur le toit de mon immeuble. Un F.F.I me hurle de rentrer me mettre à l'abri.

Agé de 20 ans, Jean Marie Plessier, étudiant à l'Ecole des Beaux-Arts, scout de France (routier au clan J3 Saint François Xavier paroisse du Bon Conseil) et soldat des F.F.I est abattu le 25 août au 30, avenue de Saxe en sortant du Bon-Secours. Transporté à l'hôpital Laënnec où il décède le lendemain, il sera inhumé le 29 août.

Né le 4 janvier 1925, Jean Robert Groslier-Douglas, soldat des F.F.I, est tué le 25 août face au 25 avenue de Ségur; il est transporté à l'hôpital Necker où son décès est enregistré.

André ne célèbrera pas le soixantième anniversaire de ses "exploits" de jeune homme. Il nous a quittés le jeudi 29 juillet 2004. Qu'il repose en paix !