La reddition de l’hôtel Majestic

Le dernier Militärbefelshaber in Frankreich (commandant militaire en France), Carl-Heinrich von Stülpnagel, 58 ans, a quitté ses bureaux de l'hôtel Majestic le 21 juillet 1944 à destination de Berlin. Il y est convoqué pour répondre des évènements qui se sont déroulés à Paris quelques instants après l'attentat qui faillit coûter la vie à Hitler. Sur ses ordres, tous les SS en poste dans la capitale ont été arrêtés pendant quelques heures … le temps d'apprendre que l'entreprise avait échoué. Sur la route de Verdun il fait stopper sa voiture à Vacherauville, là où il a combattu pendant la Grande Guerre, et se tire une balle dans la tête. Suicide raté … il sera pendu le 30 août 1944 à la prison de Plötzensee pour sa participation au complot. Le général d'aviation Karl Kitzinger le remplacera quelques semaines avant de partir à son tour, le 17 août à la veille de l'insurrection. De nombreux services de l'administration allemande ont été installés à l'hôtel Majestic pendant l'occupation, la garnison en place le 18 août y est encore importante : officiers d'état-major, administratifs, civils …

Le Majestic sera dur "à prendre" …

avenue Kléber des défenses anti-chars ont été installées


rue La Pérouse les Allemands ont construit un immense blockhaus.

C'est au chef de bataillon Jacques Massu de la 2ème DB qu'échoit cette mission au matin du 25 août 1944. Il a campé la nuit précédente au Pont de Sèvres où ses hommes ont essuyé le retour inopiné d'une compagnie de DCA allemande. A dix heures la colonne s'ébranle. Rue Michel Ange, avenue Mozart, rue de la Pompe, avenue Victor Hugo … l'Etoile. Le commandant Massu est renseigné sur les positions allemandes par les FFI. Une rafale de mitrailleuse … ça vient de la rue de Presbourg. Le char de tête tire … les défenseurs du petit blockhaus sont morts. 14h30, la place de l'Etoile est atteinte. Les hommes établissent des bouchons sur toutes les avenues.

La 5ème compagnie du 2ème RMT s'approche de l'avenue Kléber … les Sherman et les tanks Destroyer canonnent. C'est un feu d'artifice. Les Allemands réfugiés dans l'hôtel font savoir qu'ils veulent bien se rendre mais à une autorité militaire uniquement. Le commandant Massu accompagné du sergent-chef Dannic se présente à l'entrée de l'immense blockhaus donnant dans la rue La Pérouse. Un sniper abat Dannic. Massu entre et … à grands "coups de gueule" rassemble dans le hall une cinquantaine d'officiers dont deux colonels.

Trois cents hommes de troupe se rendent. Au n° 24 de l'avenue Kléber un petit détachement résiste encore dans l'immeuble des assurances l'Abeille. Massu y envoie le lieutenant Berne.


Les prisonniers sont conduits vers la Place de l'Etoile …

soudain une grenade incendiaire explose … le caporal-chef Néri est transformé en torche vivante, le commandant Mirambeau est blessé … les civils présents se ruent sur les prisonniers.

Les Marsouins de la 2ème DB ouvrent le feu … les Allemands tombent.

On peut lire dans plusieurs ouvrages consacrés à la Libération de Paris que c'est un officier prisonnier qui a lancé cette grenade. Il l'aurait cachée sous sa capote avant de sortir de l'hôtel Majestic. Ailleurs on dit que c'est un plénipotentiaire …

Le soldat accroupi contre l'arbre s'appelle Jacques Desbordes. Dans le n° 103 de la revue "39-45 Magazine" de janvier 1995 il nous livre sa version des faits : un sous-officier qui escorte les prisonniers fait partir accidentellement la grenade fumigène au phosphore accrochée à son blouson. Un nuage opaque enveloppe la colonne… une mitrailleuse ouvre le feu … quand la fumée se dissipe … les cadavres des soldats allemands qui ont tenté de rebrousser chemin au moment de l'explosion. Plus loin le porteur de la grenade; il est étendu près d'une palissade, grièvement brûlé.

Quelques uns des  FFI qui ont participé à la bataille en faisant le coup de feu avec les soldats de la 2ème DB

Les victimes :

 

René Dannic, 38 ans, originaire d'Audierne (Finistère), sergent-chef de la 5ème compagnie du 2ème RMT. Il avait rejoint le général Leclerc au Maroc.

Jacques Weinbach, FFI de 29 ans, mortellement atteint rue du Dôme

Raymond Bonenfant, 35 ans, caporal des FFI, tué rue de Galilée

Paul Guerre, 37 ans, commissaire de police au commissariat spécial de la Gare de l'Est et sous-lieutenant des FFI, tombé avenue d'Iéna

 

 

Francis Kreiss, FFI de Pantin, tué rue La Pérouse

Léon Charbonnel, 35 ans, sergent des FFI, déchiqueté par la grenade qu'il tenait à la main main lorsqu'il a été abattu d'un coup de fusil rue Paul Valéry

 

Jean Bonnelye, 34 ans, mortellement blessé place Victor Hugo

André Jonniaux, maréchal des logis-chef sur le char Camargue du 3ème peloton du 2ème escadron du 12ème RCA tué par un tireur des toits avenue Victor Hugo

le fils du pharmacien de May (boulevard Voltaire) victime d'une balle perdue quand les soldats de la 2ème DB ripostent aux tireurs des toits.